Place Louise-de-Bettignies

La place Louise-de-Bettignies occupe, dans sa partie nord face aux rues de la Rapine et d’Ostende et à l’avenue du Peuple belge, l’espace de l’esplanade du château de Courtrai démoli au début du xvie siècle lors de la démolition des murailles de cet édifice et prend le nom de place du Château.

Sa partie sud jouxtant la rue de la Monnaie et la place du Lion d’Or, plus ancienne, faisait partie du forum primitif de la ville. Cette partie à l’entrée de la porte de Courtrai disparue au début xvie siècle lors du démantèlement de ce château était la place Saint-Martin ». À la fin du xixe siècle les deux places ont été confondues sous le nom de Saint-Martin renommée « place Louise de Bettignies » en 1934.

Le moulin du château qui existait en 1291 était situé sur cette place au débouché du canal du Moulin du château sur la Basse Deûle. Ce moulin détruit par un incendie en 1856 est remplacé en 1857 par la halle du marché Saint-Martin de 45 mètres de long sur 30 de large. Ce bâtiment est détruit dans les années 1930 laissant la vue libre sur l’avenue du peuple belge, bassin de la Basse Deûle comblé à la même époque.

Septième d’une famille de neuf enfants, Louise naît en 1880 près de Lille, au moment où son père quitte son usine de porcelaine en déclin. Louise a une profonde affection pour lui. Son frère aîné Henri, ordonné prêtre en 1892, sera son appui dans les aventures de sa vie liées à son patriotisme et à sa foi. Polyglotte, grâce à des études en Angleterre et à ses emplois de préceptrice dans des familles européennes, elle revient à Lille en 1914. La prise de la ville par les Allemands la pousse à s’impliquer dans la Ligue des patriotes résistants, avec son amie Germaine Féron-Vrau, Mgr Charost* et de nombreux prêtres et religieux. Au péril de sa vie, elle accepte de transporter à Béthune, où est réfugiée sa mère, des lettres de familles du Nord et prend le nom d’Alice Dubois. Contrôlée par les Anglais à Folkestone, elle rencontre des officiers du Foreign Office dont elle accepte finalement la direction du réseau Ramble.

Après un rapide stage en Angleterre, elle forme peu à peu quatre-vingts agents dont une ancienne ouvrière, Marie-Léonie Vanhoutte, devenue Charlotte Lameron. Risquant leur vie, elles transportent des renseignements aux Pays- Bas. Charlotte est arrêtée le 13 septembre 1915 à Froyennes. Emprisonnée à Tournai puis à Lille, la police réalise qu’elle est proche d’Alice Dubois, arrêtée en octobre 1915.

Leur confrontation permet de les inculper toutes les deux. Elles passent en jugement devant les tribunaux militaires allemands à Bruxelles, le 16 mars 1916 ; ils requièrent la peine de mort pour Louise, commuée en travaux forcés à perpétuité, et quinze ans de réclusion pour Marie-Léonie. Toutes deux sont envoyées au bagne allemand de Siegburg dirigé par un ancien militaire sans pitié, Herr Dürr. Il surveille étroitement Louise et la prive de ses courriers et de ses paquets. Le 16 décembre 1916, apprenant que les condamnées en atelier doivent peindre des têtes de grenades, travail interdit par les conventions de Genève, Louise organise une révolte. Elle est jetée au cachot et en ressort malade de la pleurésie.

Opérée en prison, son état s’aggrave et, grâce aux démarches de ses proches, elle est enfin transférée à l’hôpital Sainte-Marie de Cologne, où elle mourra seule, le 27 septembre 1918. Enterrée sans cérémonie au cimetière de la ville, il faut attendre le 4 mars 1920 pour que les chefs d’État et les généraux alliés puissent assister à Lille à ses funérailles nationales. Le 13 novembre 1927, la maréchale Foch et la générale Weygand obtiennent de faire élever dans sa ville la seule statue de cette héroïne et espionne de la Grande Guerre, Louise de Bettignies, la « Jeanne d’Arc du Nord ».